Les discours sur la race du siècle des Lumières ont longtemps fait l’objet de critiques au sein de la tradition intellectuelle noire. Si certains théoriciens noirs de la race comme W.E.B Du Bois ou Edward Wilmot Blyden ont répondu aux idées racistes de l’humanisme par des discours tels que le panafricanisme, d’autres comme Kwame Anthony Appiah et Paul Gilroy ont adopté une position beaucoup plus critique à l’égard de l’expression de l’identité raciale en tant que contre-discours de la modernité européenne. En fait, ils remettent même en question les fondements raciaux de cette forme de radicalisme noir qui, selon eux, exprime les limites de l’approche des identités à travers le paradigme racial. Cette conversation philosophique crée deux courants différents dans la tradition intellectuelle noire : une école de pensée racialiste qui reconnaît la condition globale des Noirs comme ontologie afin d’exprimer un discours panafricaniste qui libère le sujet noir de l’hégémonie blanche, et une école anti-racialiste qui dénonce le racisme anti-Noirs en présentant la modernité européenne comme un syncrétisme culturel qui transcende les particularités raciales.