Dans ce premier roman, Henri Lopes fait vivre devant nos yeux N'Kamba dit « Delarumba », champion de football dans son pays, et Wali, sa femme. Ils vivent la vie de beaucoup de couples africains, avec un grande liberté pour l'homme et un rôle plutôt secondaire, fait de soumission, pour la femme. Si Delarumba peut « progresser » socialement - il devient diplomate grâce à ses relations tribales - sans que cela change quoi que ce soit à son attitude envers le monde et à ses relations avec sa femme et les femmes en général - il n'en va pas de même pour Wali, sa femme. Elle évolue, et rapidement. Trop rapidement ? Sa désillusion après le mariage, sa rencontre avec l'Europe - pourtant berceau du colonialisme - et avec les Blancs, avec la politique aussi, la font réfléchir profondément et progresser plus vite - et plus loin - que son mari. Alors, elle refuse le simple rôle de bonne-à-tout-faire et de reproductrice dans lequel semble l'enfermer son mari (et la conception traditionnelle ?). Et c'est la rupture. Est-ce la fin inéluctable de « l'émancipation de la femme » ? L'auteur ne se prononce pas. Il ne se prononce même pas sur la valeur de cette évolution particulière de Wali où sans doute beaucoup d'arguments sont plus « appris » que réellement intégrés. Son histoire est ouverte. Elle pose une question. Une chose seulement semble sûre : l'évolution de la femme, son émancipation, ou plus simplement une meilleure relation dans le couple, ne sont possibles - en Afrique comme ailleurs - que si l'homme évolue. Il n'est donc pas étonnant d'apprendre que la première ébauche de ce roman portait le titre plus dur de « Les charognards ». Maintenant, ici commence la nouvelle romance. Ici finit le roman de chevalerie. Ici, pour la première fois dans le monde, la place est faite au véritable amour. Celui qui n'est pas souillé par la hiérarchie de l'homme et de la femme, par la sordide histoire des robes et des baisers, par la domination d'argent de l'homme sur la femme ou de la femme sur l'homme. La femme des temps modernes est née, et c'est elle que je chante. Et c'est elle que je chanterai. - ARAGON (Les cloches de Bâle).