À la suite des combats et de l'intolérance inter-ethnique, des
centaines de milliers de Tchadiens furent contraints à l'exode vers le
Cameroun. Face à de tels cortèges funèbres porteurs de misère
matérielle, les populations camerounaises ne restèrent pas
indifférentes. Aussi bien en milieu urbain que dans les zones rurales,
elles manifestèrent une solidarité humaine en accueillant des réfugiés
dans leurs concessions. Mais devant la durée du séjour de plus en plus
longue, les familles camerounaises ressentirent le poids de la charge
que constituaient les nouveaux venus. La charge était d'autant plus
lourde que beaucoup de pères de famille étaient polygames, avaient une
progéniture nombreuse et des revenus assez bas. La mise en place des
structures d'accueil (camps des réfugiés) ne résolut que partiellement
le problème. À la fin des hostilités, la plupart de ces réfugiés
regagnèrent leur pays. Mais de nombreux autres, qui avaient réalisé
que le retour définitif de la paix dans leur pays n'était pas
imminent, restèrent au Cameroun; ils migrèrent progressivement vers
les grands centres urbains, et se fixèrent définitivement au Cameroun.
L'impératif de survie les amena à pratiquer diverses activités, sans
distinction de niveau de vie ou de statut social avant la guerre.
L'immense majorité des immigrés gérèrent leur survivance en pratiquant
toutes les activités qui pouvaient leur rapporter un peu d'argent.
Dans le secteur informel, dans l'agriculture, la construction, le
gardiennage, les travaux domestiques et même l'enseignement privé, ils
constituèrent une main-d'ouvre abondante, laborieuse et peu coûteuse.